mardi 26 octobre 2010

166. Jean-Guy Moreau

C'est la deuxième occasion où j'ai la chance de revoir cet artiste québécois qui arrondit ses fins de mois en présentant un spectacle d'imitations. La formule est fort simple : Dans la première partie, il chante 40 extraits de chansons françaises assez classiques pour les 40 ans et plus (et quelques jeunes curieux) les reconnaissent et apprécient son talent. Quand je l'ai vu pour la première fois, il a enchaîné les 40; cette fois-ci, il a eu un blanc de mémoire vers la 35e - blanc qui s'est poursuivi pour le reste de la performance.
Dans la 2e partie de son spectacle, il lit des "courriels" de personnes célèbres de son répertoire d'imitations. Il a trouvé la formule parfaite pour ne pas se les casser, et ça ne doit pas être très stressant à préparer.
Il n'a pas créé de nouveau matériel, il n'imite pas Louis-José Houde. Mais on ne lui en veut pas, on apprécie sa performance et les souvenirs qu'il remue.
Sauf qu'il imite de plus en plus de personnes décédées. Ça l'oblige à nous rappeler que certains "courriels" viennent de l'au-dela-ha-ha. Et ça non plus, ça ne me dérange pas.
En fait, ce billet n'a rien à voir avec Jean-Guy Moreau. Il a à voir avec les jeunes qui choisiront la carrière d'imitateur. Ils imiteront qui quand leur public ne se souviendra pas de Félix Leclerc ou de Jean Drapeau?
Je me demande qui sont les grands personnages de demain qui feront partie de la mémoire collective. Il ne m'en vient aucun à l'esprit.. et vous?

165. La communication interculturelle (suite)

Deuxième activité.
Comme dans la salle il y a un mélange d'anglophones et de francophones - tous bilingues - l'experte en relations interculturelles nous fait faire l'exercice de songer à la perception qu'on a de l'autre communauté linguistique, celle qui n'est pas la sienne. Je cherche donc, dans mon for intérieur (en tassant mon accent qui a pris toute la place depuis le début de l'atelier) comment les anglophones m'ont permis de développer une perception de qui ils sont.
C'est un exercice que je trouve difficile car les quelques expériences marquantes qui auraient pu façonner ma perception des anglos n'étaient pas déterminantes et certes pas représentatives de qui sont les anglos.
Je prends donc peu à peu conscience que c'est par opposition à mon propre groupe linguistique que j'ai développé une perception des anglos.
J'ai appris l'anglais dans la vingtaine. À l'école, on m'avait enseigné "floor" et "ceiling" ad nauseaum. (Aujourd'hui encore, je me demande comment ploguer ça dans une conversation.)
Au début, j'étais donc "pas bon". Accent gros comme le bras, francisismes en veux-tu en v'la, etc. Pourtant, jamais personne n'a commenté mes erreurs, encore moins noté ou même remarquer mon accent. Serais-je devenu bilingue si on l'avait fait? Probablement pas. Je me serais retranché sur le français, la seule langue que je pouvais parler décemment.
Pourtant, chez les francophones, c'est chose courante. On se moque grassement d'une personne qui fait une erreur, on l'imite en se roulant par terre.
Alors je pense que ma perception des anglos est somme toute assez positive, merci aux francos qui me les ont fait apprécier pour une ouverture à l'autre que je ne retrouve pas chez les miens.
Je pense ensuite aux élèves des écoles de langue française qui préfèrent l'anglais. Et je ne demande pas vraiment pourquoi...

dimanche 17 octobre 2010

164. La communication interculturelle

Le titre de l'atelier était accrocheur, j'ai besoin de ce genre d'informations pour un projet, je m'y suis inscrit. Ce qu'il y a de beau avec les ateliers, c'est qu'on peut pas en sortir plus cruche qu'on l'était avant.
Première activité.
Fermez vos yeux, qu'elle dit, l'experte en communication interculturelle. Visualisez un Britannique. La plupart ont vu un petit monsieur pincé avec chapeau melon et parapluie. Moi j'ai vu Mr. Bean, mais enfin.
Maintenant, visualisez un Italien. Tout le monde a vu un grand noir avec une chemise blanche serrée avec le col ouvert qui laisse entrevoir ben ben ben du poil. Moi j'ai vu autre chose, mais j'ai mes raisons.
On continue. Visualisez une Québécoise. Là tout le monde voit une petite femme mince habillée dernière mode. Je vois la même chose que tout le monde. J'entends quelqu'un en arrière qui dit bitch. Je crois qu'elle en veut aux petites femmes minces bien habillées.
Ensuite elle nous demande de visualiser une Acadienne. Tout le monde, sauf moi, VOIT un accent. Oui, oui, ils voient un accent. Alors moi j'imagine une Acadienne qui entre dans la pièce et tout le monde VOIT son accent qui lui pend au coin de la bouche.
Bon, les commentaires sur l'accent acadien, je les classe vite parmi l'ignorance crasse et je passe à autre chose. Défilent une Allemande, un Autochtone et une Jamaicaine. Toutes visuellement bien nanties qui n'ont pas besoin d'aller au fond de leur histoire pour se faire voir.
Et là, l'experte en communication interculturelle en rajoute. Elle nous partage en toute intimité qu'elle vient du Québec et qu'elle a passé 25 ans au Nouveau-Brunswick, donc toute sa carrière à mon avis. Et sa grande fierté, c'est d'avoir l'an dernier, enfin, avec beaucoup d'effort, pu comprendre une conférence entière d'Antonine Maillet. Quelle éclosion touchante! J'en avais la mâchoire serrée d'émotions.
Ces commentaires, je commence à m'habituer à les entendre depuis que j'ai osé sortir de mon terroir. Je ne savais pas que j'étais une minorité visible (!) et je l'ai appris de la bouche même d'une experte en communication interculturelle. Je pense que je n'y aurais pas accordé grande importance si elle n'avait pas, justement, eu la prétention de s'y connaître dans le domaine.
Pas besoin de vous dire que je n'ai pas pris de notes sur les conseils qu'elle avait à nous donner. Je trouverai autre chose.
(à suivre)

lundi 11 octobre 2010

163. Action de rien faire

Action de Grâces. Je sais pas trop quoi faire de cette journée qui me semble venue tout droit d'une bizarrerie américaine. Alors je prends le congé avec joie, et je ne fous rien. Pas d'action. Ni ne grâces, ni d'autre chose.
Je suis sur la table d'une cuisine étrangère dans une maison qui m'est peu familière et que je découvre peu à peu, comme son quartier d'ailleurs.
J'ai offert à une parente de venir s'installer chez moi en attendant que les rénovations de sa maison soient terminées. Ils sont quatre, avec un chien et un chat. J'ai déménagé, c'est mieux comme ça. Je ne regrette pas d'avoir lancée l'invitation qui fut accueillie comme une bouée de sauvetage. La preuve : si c'était à refaire, je ferais la même chose.
Je me suis installé chez mon copain. J'essaie de ne pas être trop envahissant, mais je le suis quand même. C'est pas très grand ici, mais on s'entend bien. Un mariage forcé, mais on sait que c'est pas pour la vie.
La maison est ancienne, dans un petit quartier qui a déjà été très français. La maison en témoigne. La cuisine surtout.
Ce matin, on prend un café tout tranquillement. C'est calme. On se demande ce qu'il y a d'ouvert aujourd'hui. Je me dis qu'il doit y avoir quelques dépanneurs ici et là. Je vous raconte ça parce que c'est le fil qui m'a fait penser à la cuisine de mon enfance, où ma mère s'affairait entre les interruptions du magasin adjacent. Aujourd'hui, on appellerait ça un dépanneur. À l'époque, c'était l'épicerie de plusieurs personnes, surtout les voisins évidemment. Et il était ouvert très tôt, jusque très tard. En fait, il n'était pas rare qu'il fermait et qu'on l'ouvrait pour quelqu'un en besoin de médicaments, de cigarettes, ou de pain ou de lait.
Des matins comme celui-ci, mes parents n'en avaient pas beaucoup. Le magasin en question était dans la maison. Au début, il n'y avait qu'une seule porte communicante, dans le salon. Plus tard, ma mère a insisté pour qu'il y en ait une autre, donnant sur la cuisine cette fois : "Au moins, je pourrai surveiler mes patates." avait été son argument.
Quand il n'y avait pas de clients, elle retournait dans sa cuisine. Quand quelqu'un entrait dans le magasin, il y avait une cloche qui se faisait entendre dans la maison. On l'appellait la cloche, mais c'était un gros bourdonnement. Quand ma mère brûlait le repas, elle l'appellait la maudite cloche à vache, ou la cloche à marde, selon l'humeur du moment. Néanmoins, c'était un bourdonnement, déclenché par le contact de deux fils électriques, l'un sur le cadre supérieur de la porte, l'autre sur la porte. Quand la porte s'ouvrait, le contact se faisait et déclenchait le bourdonnement. Il arrivait qu'un client ne referme pas la porte complètement derrière lui et que les parties du circuit restent en contact. Le bourdonnement devenait alors incessant. Si on était en train d'écouter une émission de télévision, on tentait de crier à la personne qui était dans le magasin de fermer la porte. Mais souvent ça ne marchait pas et il fallait se lever pour aller fermer la porte soi-même. Ou pour monter le volume de la la télévision au maximum, juste pour faire un point.
Mais ce matin, tout ce qui me préoccupe, c'est de savoir si mes parents ont eu le temps de s'assoeir le matin pour prendre le déjeuner en parlant de tout et de rien.