mardi 16 février 2010

135. J'ai rêvé à mon père

Oui, oui, ça vient tout juste de se produire. Je me dépêche à le raconter, les rêves ça a tendance à disparaître de ma mémoire, et déjà que c'est pas mal flou...
On était dans une grande fête, genre mariage, mais je sais pas très bien.
J'étais assis à une table ronde avec d'autres personnes, je sais plus qui et je ne crois pas que je le savais dans le rêve.
Il s'est levé et il est allé au buffet (je ne sais pas mais ce serait bien son genre, il aimait bien manger).
J'ai dit à la gang dont je ne souviens plus : « Vous avez vu comme il est petit mon père? » Il était petit dans mon rêve alors qu'il était plutôt corpulent dans la vie.
Et là, une grosse musique s'est fait entendre.
Ma soeur, sortie de je-ne-sais-où a dit « Oh, cette musique, ça annonce rien de bon. Papa va mourir, c'est certain. »
Comme de fait, il est tombé face première raide mort sur le coin du mur pas très loin de ma table.
Mais il s'est relevé, comme si de rien n'était, et il est venu me parler. Juste à moi. Ensuite, il est re-mort de nouveau.
C'est quand même chien les rêves hein? Quand je me suis réveillé, et que j'ai décidé de courir à l'ordinateur écrire tout ça, je me souvenais très bien de ce qu'il m'a dit.
Et vous pensez que je m'en souviens maintenant?

jeudi 11 février 2010

134. Un bébé non-désiré

Entendu à une réunion :
- Ce projet c'est devenu mon bébé, mais moi je ne voulais pas que ce bébé-là soit juste à moi.

mercredi 3 février 2010

133. Lettre d'un immémorant

Il y a des néologismes qui s'imposent, d'autres qui sont plus accrocheurs. Celui-ci est des deux. J'ai découvert le concept d'immémorant avec soulagement, réalisant enfin que je fais partir d'un sinistre club de primates sans mémoire collective, qui regarde les nouvelles comme si tout ça sortait d'un studio de la Warner Bros., incapables de comprendre les vrais enjeux de l'actualité, encore moins leur source, comme si tout ça était sorti de l'imagination d'un Spielberg qui aurait recréé en studio les rives de la Méditerranée.
Tout ça parce qu'hier soir je suis allé voir un spectacle de mandolines ukrainiennes, une symphonie au grand complet, un truc qui remonte à 1919, certains joueurs étant d'ailleurs des membres fondateurs, et j'exagère à peine. Sonorités russes, autrichiennes de temps en temps, hongroises c'est comme rien, tout ça revu au goût du jour, bien entendu. J'écoute ça comme un gros con, vaguement conscient que c'est leur histoire qu'ils sont en train de me gratter là sur les cordes de leurs instruments de leurs mains osseuses. Et ils font quoi ici ces Ukrainiens?
À 16 ans, j'ai passé une semaine dans une famille ukrainienne en Saskatchewan, mon premier grand voyage, merci Trudeau.
À 50 ans, je passe une soirée à les regarder se trémousser la mandoline.
Et je sais toujours pas ce qu'ils sont venus faire ici. C'est pire, je ne me le suis jamais demandé avant ce soir. On décide pas un dimanche après-midi de partir d'Ukraine et de se rendre dans les Prairies canadiennes pour n'en jamais revenir, pour y perdre ses origines, et pour jouer de la mandoline jusqu'à ce que mort s'ensuive. Je ne sais pas, je n'ai jamais su, je suis un immémorant.
Je suis perdu dans mes réflexions quand v'là-ti-pas qu'une douzaine de jeunes danseuses et de jeunes danseurs sort d'on ne sait où parmi le club d'âge d'or qui gratte furieusement les cordes de ses instruments. Les filles portent des jupes colorées qui ressemblent à des abat-jours quand elle tournoient sur elles-mêmes. Les garçons portent des grosses culottes bouffantes en rayonne et font des pirouettes parmi les abat-jours. L'auditoire que nous sommes est en extase, ça c'est de la vraie culture. Le chef d'orchestre s'emballe, ses quelques cheveux blancs s'affolent, je crains une crise d'apoplexie, mais non, il ne fait que donner l'ordre à ses ostéoporosiens de nous épater avec quelques succès américains. La foule est en délire, moi j'ai peur qu'ils nous poussent du Britney Spears et que les abat-jours s'envolent.
Ça doit être le vin, mais je vois les petites danseuses acadiennes, j'entends Elvis dans les boutiques du Vieux-Québec, des congrès mondiaux de têtes blanches, et j'ai peur. J'ai peur que le géant d'à-côté ait tout cassé dans la vitrine et qu'il n'y ait plus de place pour survivre quand on est différent.
Mais je ne suis qu'un immémorant, qu'est-ce que j'en sais?!