samedi 15 mars 2008

66. Une écharpe tachetée

Je mets ça sur le dos du déménagement en Ontario. Ça ne m'était arrivé qu'en de très rares occasions mais là, c'est deux fois la même fin de semaine.
D'abord, y'a ce type au bar qui racolle et qui commence par me dire qu'il aime bien mon écharpe. Retenez bien que la première phrase de notre entretien était la sienne :
- J'me suis tacheté le même foulard que toué.
Ç'aurait dû en rester là mais la nature humaine n'est pas faite ainsi. Je lui réponds une banalité dont j'ai oublié l'ampleur mais qui amène mon compère à me répondre :
- Ahh.. t'es pas Français.
Il me laisse à peine le temps de prendre ça pour un compliment qu'il en rajoute pour préciser la teneur de ses propos :
- Le français, c'est pas ta langue, hein?
Tiens donc!
Je devais être dans un état d'esprit proche d'une torpeur béatifiante car au lieu de l'envoyer chier, je décide de m'enquérir de l'étendue de son savoir en linguistique des accents :
- Alors, comment t'as deviné que je suis un anglophone qui parle français?
- Ben, c'est facile : tu pa'les pas comme moué.
En effet, l'équation est d'une simplicité qui me renverse. Mon voisin de bar n'est jamais descendu de son arbre, voilà qui explique tout.
Nous poursuivons ensuite notre conversation comme de vieux potes. Je tiens le rôle de l'Anglophone de passage à Montréal, lui de chanteur dans un groupe. (En fait, il m'explique qu'il est le screamer dans un band de heavy metal et après l'avoir googlé, ce crétin disait vrai. Pour le groupe heavy metal, mais aussi pour le screamage.)
Ils ont joué dans un bar quelque part et un recruteur les a invités au Texas, déplacement et hébergement payé avec un cachet. Ce bout-là, je sais pas si c'est vrai mais lui y croyait en tout cas.
Plus tard, dans une boutique, la vendeuse me demande mon numéro de téléphone et quand je lui donne le 613, elle confirme ses doutes à haute voix :
- Ahh je me disais aussi que vous étiez pas d'ici.
Pour l'emmerder un peu, je lui lance :
- Ah oui?! Comment ça?
Même réponse :
- Ben, vous parlez pas comme nous autres. (Notez la nuance où celle-ci appartient à un groupe plus étendu que mon compère du bar.)
Je ne sais pas trop si elle s'est rachetée, mais quelques instants plus tard, elle cause avec deux bambins qui courent partout dans la boutique pendant que leur mère fait son shopping.
Le plus vieux des deux enfants :
- Nous, on est Français. (avec l'accent et tout et tout)
La vendeuse :
- Ahhh.. vous êtes chanceux. Vous parlez bien vous autres!
Comme diraient les Français : « On est toujours le Belge de quelqu'un d'autre! »

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